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Un guide complet pour définir votre stratégie de prix
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Un guide complet pour définir votre stratégie de prix

En grande distribution, le prix demeure un levier décisif et particulièrement complexe à maîtriser. Les données récentes en témoignent. Selon Circana (relayé par Le Monde), les marques de distributeur atteignent désormais 36,5 % des achats en valeur de produits de grande consommation des Français, un record largement alimenté par les années d’inflation que nous venons de traverser.

Ce chiffre pose une évidence : ajuster ses prix au fil de l’eau, sans vision d’ensemble, ne suffit plus. Une entreprise, de grande distribution ou autre, a besoin d’une stratégie de prix pour préserver ses marges, défendre son positionnement et répondre à des consommateurs toujours plus attentifs au rapport qualité-prix.

 

Qu’est-ce qu’une stratégie de prix ?

 

Une stratégie de prix ne se réduit pas à un simple calcul de marge. Bien plus complexe, elle sert avant tout de feuille de route aux entreprises. Elle détermine notamment :

  • comment les produits se positionnent sur le marché ;
  • si les coûts de production sont couverts ;
  • si l’image qu’une marque souhaite véhiculer est respectée.

À la différence d’une promotion, qui est par nature ponctuelle, la stratégie de prix s’inscrit dans le long terme. Elle oriente les décisions tarifaires, structure les arbitrages des dirigeants et définit le rôle de chaque référence au sein des assortiments produits.

 

Pourquoi une bonne stratégie de prix est indispensable ?

 

Une stratégie de prix rigoureuse remplit plusieurs fonctions essentielles.

Tout d’abord, elle protège les marges dans un environnement où les coûts (matières premières, logistique, énergie) restent instables.

Ensuite, elle permet d’éviter de tomber dans des spirales de baisses de prix successives. Sans cadre défini, une réduction peut en effet déclencher des réactions concurrentielles en chaîne, au détriment de tous les acteurs du marché. Une stratégie bien pensée permet de protéger les enseignes de ces effets de bord néfastes et inattendus.

Sur le plan marketing, elle structure l’image des produits. Un prix bien calibré renforce le positionnement premium d’une gamme ou, au contraire, légitime une offre économique.

Enfin, la stratégie de prix facilite les ajustements selon le cycle de vie du produit, du lancement au déclin, en assurant la stabilité et la maturité de l’offre.

 

Les 9 stratégies de prix incontournables 

 

1. Prix par majoration des coûts

La stratégie de prix par majoration des coûts, aussi appelée modèle « cost-plus », consiste à calculer le coût de revient complet (production, logistique, etc.) puis à y appliquer une marge fixe.

La formule est donc : Prix = coût de revient + marge fixe.

Cette méthode est pragmatique, transparente et facile à expliquer en interne. Elle garantit également que les coûts sont systématiquement couverts et offre une bonne prévisibilité ainsi qu’une sécurité pour la marge.

Ceci étant, cette approche est limitée car elle ne prend en compte ni la demande ni la concurrence. Ainsi, une enseigne qui utiliserait cette stratégie de prix prendrait le risque de proposer des prix non optimisés par rapport au marché.

Cette méthode est tout particulièrement recommandée pour :

  • les industriels qui font face à des coûts bien maîtrisés ;
  • les enseignes qui sont leaders en prix et pour qui l’attractivité est le seul facteur important..

Exemple concret : de nombreux fournisseurs destinés aux marques de distributeur utilisent ce système dans leurs accords avec les enseignes, car leur coût de production est stable et clair, et c’est un levier pour sécuriser les volumes.

 

2. Stratégie d’alignement

La stratégie d’alignement consiste à aligner le prix des produits sur celui des concurrents, sans sous-évaluation systématique ni survalorisation. Par exemple, Danone a cherché à aligner ses produits « d’entrée de gamme » pour rester compétitif face aux marques de distributeur.

Cette méthode présente deux avantages majeurs. D’une part, elle assure une compétitivité équilibrée. D’autre part, elle réduit le risque de déclencher une guerre des prix et de desservir l’ensemble du marché.

Cependant, lorsqu’un magasin utilise cette méthode, il court le risque de ne pas se différencier de la concurrence, ce qui pourrait nuire à son image de marque et à ses ventes. Dans certains cas, si le marché est sous pression, les marges peuvent se comprimer et le bénéfice devenir incertain.

Cette méthode reste recommandée pour l’entrée d’un produit sur un marché saturé ou lorsque les produits présentent une faible différenciation.
 

3. Prix de pénétration

L’approche du prix de pénétration consiste à lancer un produit avec un prix agressif pour capturer rapidement des parts de marché, avant de le faire évoluer progressivement.

Cette stratégie favorise une adoption rapide, génère des volumes élevés et assure une forte visibilité.

Cependant, lorsqu’une enseigne adopte cette approche, elle fait face à deux risques. D’une part, ses marges sont faibles au départ et il faut disposer d’une réelle solidité financière pour se le permettre. D’autre part, si les consommateurs s’habituent au prix de pénétration, il pourrait être difficile de remonter le prix par la suite.

Cette méthode est donc recommandée pour :

  • les nouveaux entrants sur le marché qui souhaiteraient gagner en notoriété rapidement ;
  • les produits innovants destinés au grand public ;
  • les marques en phase de croissance qui peuvent espérer atteindre des volumes qui remboursent l’investissement initial en prix.

C’est une stratégie idéale pour certaines jeunes marques d’entretien ou de soins ménagers. Celles-ci lancent leurs références avec des prix très compétitifs en hypermarché pour gagner du linéaire rapidement.

 

4. Pricing dynamique

Le pricing dynamique est une stratégie de prix très différente des précédentes. Elle recourt à des logiciels spécialisés (tel que l’outil de pricing de Mercio) pour ajuster les prix en temps réel selon la demande, les stocks, les coûts ou la concurrence.

Cette approche est l’une des meilleures car :

  • elle offre une immense flexibilité ;
  • elle permet d’optimiser les marges avec beaucoup de finesse ;
  • elle garantit une adaptation en temps réel pour des prix toujours plus justes.

Au vu de tous ces avantages, cette stratégie requiert un investissement technologique conséquent, mais celui-ci sera bien souvent vite rentabilisé.

Cette approche est donc parfaite pour :

  • les distributeurs disposant de data ;
  • les enseignes multicanales ;
  • les acteurs e‑commerce ;
  • les GMS ayant des outils analytiques.

 

5. Tarification d’appel

La tarification d’appel repose sur un produit d’appel qui est proposé à un prix très bas. Ce prix peut être tellement bas qu’il est parfois à la limite de la rentabilité. L’objectif de cette stratégie de prix est de générer du trafic et d’attirer les clients en magasin.

L’avantage incontestable de cette stratégie est qu’elle dynamise le trafic ! En effet, grâce à elle, les enseignes peuvent augmenter le panier moyen et favoriser les ventes croisées.

Cependant, le produit d’appel génère peu ou pas de marge. Ainsi, la rentabilité dépend fortement des ventes additionnelles et requiert donc d’avoir défini une stratégie d’up-selling et/ou de cross-selling en amont.

La tarification d’appel est recommandée aux enseignes GMS qui veulent dynamiser un rayon ou lancer une catégorie. Par exemple, Carrefour pratique cette stratégie en baissant les prix sur certaines références MDD ou marques nationales populaires, pour attirer les clients et générer des ventes sur des produits plus rentables.

 

6. Stratégie d’écrémage

La stratégie d’écrémage est une approche contraire aux prix de pénétration. Elle repose sur le lancement d’un produit à un prix élevé, puis sur une baisse progressive au fil du temps.

Cette approche est classique pour les lancements technologiques, car elle permet de dégager des marges initiales fortes, de valoriser l’innovation et de cibler les adopteurs précoces.

Cependant, le volume de vente reste restreint au départ et il ne faut pas compter sur un seul produit pour assurer la profitabilité de la marque. De plus, la concurrence peut entrer rapidement sur le marché et perturber la stratégie, quitte à ce que l’enseigne n’ait pas le temps de baisser ses prix et de voir son volume de vente augmenter.

Apple est l’exemple le plus concret de cette méthode lors du lancement de ses nouveaux iPhone. 

 

7. Stratégie premium

La stratégie premium repose sur un concept simple : fixer un prix élevé pour créer l’impression d’un produit d’exception, d’une qualité supérieure, voire d’un luxe accessible.

Lorsqu’elle est bien menée, cette stratégie est très bénéfique aux marques car elle :

  • génère une forte marge ;
  • valorise l’image de marque ;
  • fidélise une clientèle exigeante.

Cependant, elle fait vite face à une limite incontournable : son marché restreint. Seul un certain nombre de clients pourront s’offrir ses produits (ou services). Ces derniers auront par ailleurs des attentes élevées qu’il faudra satisfaire !

Enfin, bien que la cible de ces produits et marques soit aisée, elle peut toujours rejeter le prix s’il semble injustifié.

Au vu de ces forces et faiblesses, cette stratégie est adaptée aux marques premium, aux produits différenciés et aux segments “luxe accessible” ou “qualité”.

Picard est l’un des cas les plus emblématiques de stratégie premium dans la distribution alimentaire. Contrairement aux marques de distributeur classiques, Picard a construit un positionnement résolument haut de gamme, tout en restant une MDD.

 

8. Stratégie d’économie

La stratégie d’économie mise sur la réduction maximale des coûts (produit, packaging, logistique) pour proposer les prix les plus bas possibles.

Comme on peut l’imaginer, cette tactique génère des volumes de vente massifs, une forte attractivité et un message commercial simple et direct. En conséquence, les marges sont minces et la qualité perçue peut être affectée.

Cette stratégie de prix convient donc tout particulièrement :

  • aux enseignes discount, comme LIDL ou ALDI ;
  • aux marques distributeur (MDD), comme Simpl de Carrefour.

 

9. Prix psychologique

La stratégie du prix psychologique repose sur les biais cognitifs pour convaincre le consommateur que les produits sont vendus au bon prix. Par exemple, cette méthode propose d’utiliser des prix « en 9 » (ex. 4,99 €) ou des affichages visuellement impactants pour donner l’impression d’une bonne affaire.

Elle présente un bon nombre d’avantages, puisqu’elle :

  • accroche efficacement l’attention ;
  • booste la conversion ;
  • s’adapte particulièrement bien au commerce de détail.

Cependant, si une enseigne en abuse, cette méthode peut affaiblir son image de marque et créer une certaine usure auprès des consommateurs.

Danone est un des maîtres de cette tactique. La marque imprime certains prix directement sur ses emballages pour ancrer la perception d’un tarif avantageux.

 

Comment choisir la bonne stratégie de prix ?

 

Afin de déterminer la stratégie qui convient le mieux à une enseigne particulière, il faut mener une analyse méthodique en plusieurs étapes.

 

Analyser le marché

La première étape d’une stratégie de prix (ou de marketing en général) est d’étudier le marché. Avant de fixer un prix, pensez à :

  • faire une veille concurrentielle (quelles sont les MDD, marques nationales ou hard discounters présents sur le marché ?) ;
  • identifier le cycle de vie des produits (sont-ils en phase de lancement ou de maturation, par exemple ?) ;
  • cartographier le rôle des produits au sein d’une gamme (sont-ils générateurs de trafic, de marge ou d’image ?).

 

Étudier les clients

Afin de savoir si un prix sera pertinent et accepté par le public cible, on recommande souvent aux enseignes de :

  • mesurer l’élasticité-prix ;
  • identifier les seuils psychologiques qui influencent l’achat ;
  • segmenter selon la fréquence d’achat et le profil socio-économique.

 

Auditer les coûts

Pour s’assurer qu’une enseigne est rentable lorsqu’elle fixe ses tarifs (ou qu’elle est au moins consciente de ses limites), elle doit auditer l’ensemble de ses coûts, fixes et variables. Par exemple, elle peut lister : transport, casse, retours et packaging, et modéliser des scénarios de variation.

 

Modéliser les marges

Une fois les coûts audités, il est conseillé aux marques de calculer leur marge brute et marge contributive pour déterminer le seuil de rentabilité. Ensuite, elles peuvent construire des scénarios prospectifs (baisse de volume, promotion, croissance) et étudier l’impact que ces variations auront sur leurs marges et donc leur rentabilité.

 

Tester avant de déployer

Mettre en place une stratégie de prix est complexe et ne se fait pas toujours du premier coup. La règle d’or est donc de tester, tester et encore tester. Par exemple, une enseigne peut :

  • piloter des A/B tests dans certains magasins ;
  • ajuster par zone géographique ou format ;
  • suivre les KPI clés pour ajuster les prix dans la durée.
Sophie Laine

Experte en marketing digital et stratégie e-business, Sophie Laine est passionnée par les nouvelles tendances et les innovations qui transforment le monde des entreprises. À travers son blog, elle explore les dynamiques des réseaux sociaux, le marketing numérique, et l’évolution des stratégies en ligne. Avec son expertise en social media et marketing digital, elle aide les entreprises à naviguer dans un environnement en constante évolution, en partageant des analyses pertinentes et des conseils pratiques pour réussir dans l’univers